HOMMAGES ET RETROSPECTIVES
Isabelle Huppert, européenne |
© sbs distribution
Elle
Paul Verhoeven
2016 - France / Allemagne / Belgique - 2h06 - VOF+STA
int. -12 ans
D'après le roman de Philippe Djian
Horaires :
vendredi 26 janvier - 16h45 - Grand Théâtre - suivi d'une rencontre avec Isabelle Huppert - comédienne et Serge toubiana - critique et journaliste
Michèle fait partie de ces femmes que rien ne semble atteindre. À la tête d'une grande entreprise de jeux vidéo, elle gère ses affaires comme sa vie sentimentale : d'une main de fer. Sa vie bascule lorsqu'elle est agressée chez elle par un mystérieux inconnu. Inébranlable, Michèle se met à le traquer en retour. Un jeu étrange s'installe alors entre eux. Un jeu qui, à tout instant, peut dégénérer.
« On vous le rappelait la semaine dernière au moment de la présentation cannoise du film : Isabelle Huppert, non contente d'être la plus grande actrice vivante, traverse un moment absolument passionnant de sa filmographie. Plus qu'un moment de son jeu, c'est la naissance d'un genre à part entière, appelons-le Huppert movie, un genre de survival au féminin où l'actrice déambule, d'un air gourmand et amusé, au milieu d'un champ de ruines. À ce genre, Elle offre une véritable apothéose, en même temps qu'il souligne le plaisir qu'a l'actrice à accompagner des cinéastes eux-mêmes décidés à détraquer de l'intérieur le cinéma français. Ainsi de Tip Top de Serge Bozon, qui offrait en quelque sorte le mode d'emploi de ce dérèglement : Huppert y prenait des coups et semblait y trouver son plaisir. Un an plus tard, dans Abus de faiblesse, Breillat la filmait affaiblie et, dans une longue et très belle scène, littéralement à terre, tentant péniblement de se relever après une chute. Huppert y signait des chèques, vampirisée par un playboy, et Breillat concluait sur un gros plan du visage larmoyant de son actrice répétant inlassablement : « C'était moi mais c'était pas moi ».
Cette réplique, l'héroïne de Verhoeven pourrait la reprendre à son compte, pareille à ce chat sur lequel s'ouvre le film et qui regarde, imperturbable, sa maîtresse se faire violer sur le parquet de son appartement. C'est un plan qui vaut comme un dédoublement : Huppert y est moins cette victime en train de se faire agresser que le félin posé juste à côté, regardant s'abattre la catastrophe avec un regard tranquille et indifférent. L'agresseur enfui, Michelle se lève, prend un bain, remet de l'ordre dans son appartement, commande des sushis, fait un test HIV et annonce tranquillement la nouvelle de son agression à ses amis : aucun trauma, juste une série de procédures à suivre, un ordre extérieur à rétablir, et pour toute psychologie, une porte blindée, froide comme la mort. Mais ce viol, qui inaugure une vraie fausse intrigue policière, n'est que le début d'une série de petites catastrophes intimes auxquelles Michèle répondra par toujours plus de froideur. Elle est là, bien présente physiquement, mais totalement absente à elle-même.
C'est là le génie de Huppert, et celui des grands acteurs peut-être – on aimerait leur demander : « où êtes-vous quand vous jouez ? », et c'est précisément la question que semble poser à chaque séquence le film de Verhoeven. D'ailleurs cette question, le personnage de Huppert y est bel et bien soumis, lorsqu'après l'amour son amant lui demande « Comment t'es venue l'idée de faire la morte ? ». On se souvient que déjà, dix ans plus tôt dans Black Book, Carice van Houten faisait la morte pour échapper aux nazis, étendue dans un cercueil et grimée en victime du typhus. Black Book et Elle sont à ce titre comme des jumeaux secrets, deux portraits de femmes non pas fortes mais mortes, qui traversent l'une comme l'autre un long cauchemar ironique. » (Murielle Joudet ; Chronicart)
Cette réplique, l'héroïne de Verhoeven pourrait la reprendre à son compte, pareille à ce chat sur lequel s'ouvre le film et qui regarde, imperturbable, sa maîtresse se faire violer sur le parquet de son appartement. C'est un plan qui vaut comme un dédoublement : Huppert y est moins cette victime en train de se faire agresser que le félin posé juste à côté, regardant s'abattre la catastrophe avec un regard tranquille et indifférent. L'agresseur enfui, Michelle se lève, prend un bain, remet de l'ordre dans son appartement, commande des sushis, fait un test HIV et annonce tranquillement la nouvelle de son agression à ses amis : aucun trauma, juste une série de procédures à suivre, un ordre extérieur à rétablir, et pour toute psychologie, une porte blindée, froide comme la mort. Mais ce viol, qui inaugure une vraie fausse intrigue policière, n'est que le début d'une série de petites catastrophes intimes auxquelles Michèle répondra par toujours plus de froideur. Elle est là, bien présente physiquement, mais totalement absente à elle-même.
C'est là le génie de Huppert, et celui des grands acteurs peut-être – on aimerait leur demander : « où êtes-vous quand vous jouez ? », et c'est précisément la question que semble poser à chaque séquence le film de Verhoeven. D'ailleurs cette question, le personnage de Huppert y est bel et bien soumis, lorsqu'après l'amour son amant lui demande « Comment t'es venue l'idée de faire la morte ? ». On se souvient que déjà, dix ans plus tôt dans Black Book, Carice van Houten faisait la morte pour échapper aux nazis, étendue dans un cercueil et grimée en victime du typhus. Black Book et Elle sont à ce titre comme des jumeaux secrets, deux portraits de femmes non pas fortes mais mortes, qui traversent l'une comme l'autre un long cauchemar ironique. » (Murielle Joudet ; Chronicart)
GENERIQUE
Interprétation :Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Anne Consigny, Charles Berling, Virginie Efira, Judith Magre, Christian Berkel, Jonas Bloquet, Alice Isaaz, Vimala Pons
Scénario : David Birke
Image : Stéphane Fontaine
Montage : Job ter Burg
Musique : Anne Dudley
Production : SBS Productions, Twenty Twenty Vision Filmproduktion GmbH, France 2 Cinéma, Entre Chien et Loup
Distribution : SBS Distribution